# Vie privée et dangers
Voici le premier volet de la série d’articles sur la vie privée.
Définition de la vie privée
Même si certaines personnes affirment que la vie privée n’existe plus, je suis convaincu qu’elles ne raconteraient pas tout de leur vie en public; ce qu’elles racontent sur les réseaux n’est pas l’intégralité et n’est peut-être même pas vrai. Elles ne laisseraient pas non plus la porte des toilettes grande ouverte en tout lieu.
Je ne vais pas recopier la définition d’un dictionnaire mais tenter de résumer ce qu’on peut en dire:
Définir sa vie privée c’est définir les cercles de personnes auxquelles on va raconter tel ou tel aspect de sa vie, de ses pensées, de ses rêves et traumatismes.
Ce que vous racontez à vos parents proches, n’est pas ce que vous allez raconter ou montrer à vos meilleurs amis, qui est encore différent de ce que vous montrez à vos amis et est encore différent de ce que vous publiez sur les réseaux à de parfaits inconnu-e-s ou à toutes les personnes « qui vous suivent » [1]
Vous vous rendez bien compte que vous ne dites pas forcément qui vous fréquentez, (amicalement, sexuellement ou sentimentalement), où est-ce que vous vivez, ce que vous mangez, ce que vous faites de votre temps libre, .. à ces groupes de personnes tout le temps et sans aucune distinction.
Nous avons donc tous une vie privée.
« Je n’ai rien à cacher »
Ce que font les sociétés aujourd’hui, les GAFAM mais beaucoup d’autres aussi, c’est vous enlever cette sélection et ces choix. Ils vous incitent à tout partager, sous prétexte que vos cercles sont restreints mais eux récupèrent tout sans distinction pour en faire leur business.
Ces entreprises veulent revendre vos données et métadonnées à leur clients, qui eux sont intéressés par savoir ce que vous faites et aimez pour vous proposer quelque chose à acheter, c’est majoritairement pour cela, il n’est pas question d’une conspiration ici. Mais le fait même que ces données soient enregistrées quelque part est un problème sérieux.
Des parents peuvent découvrir la sexualité de leur enfant par hasard, un conjoint peut apprendre l’infidélité de sa/son partenaire, une grossesse, un gain d’argent important, … , les exemples sont infinis.
« Je n’ai rien à cacher » est une réponse qu’on entend souvent lorsque l’on veut alerter sur les dangers de ne plus avoir de vie privée.
C’est faux.
Déjà avec les exemples du paragraphe précédent vous pouvez vous en rendre compte. Et des raisons plus sociétales existent, c’est exactement ce que racontent les liens du site “Je n’ai rien à cacher” : Ce que vous voulez cacher n’est pas ce que vous pensez être honteux, mais ce que la société trouve honteux/souhaite voir disparaitre.
Et des changements de société radicaux ça existe ! L’évolution des mœurs vers moins de libertés est possible comme en attestent les évènements aux USA depuis 2020 [2], et partout ailleurs dans le monde.
Les données privées et métadonnées
Aujourd’hui, avec l’informatisation globale, connectée, tout est une donnée. Autant la photo de votre assiette que le nombre de pas que vous avez fait par jour, que votre dernier SMS à votre ami(e) d’enfance ou l’heure à laquelle vous allumez le chauffage/la climatisation, TOUT.
Les métadonnées sont des informations associées à d’autres données: Dans les informations contenues par la photo de votre assiette, il y a l’image de l’assiette mais aussi la date et l’heure à laquelle elle a été prise ainsi que, très souvent, la position GPS s’il est allumé.
Une donnée qu’on ne pense pas importante: le modèle de l’appareil qui a pris la photo. Une info anodine en apparence mais qui peut donner votre niveau de vie, donc votre propension à dépenser, faisant de vous un prospect idéal pour les vendeurs (qui achètent vos profils).
Et plus indirectement, grâce à l’égémonie de ces plateformes, si toutes les personnes qui ont pris une photo de leur assiette ce jour là l’ont laissée être copiée sur un compte Google ou Apple, ces deux entreprises savent qui de leurs clients étaient dans ce restaurant ce jour là, à cette heure là.
Un autre exemple, avec les services domotiques de ces grosses entreprises l’heure à laquelle vous rentrez chez vous est aussi connue par l’allumage de la lumière du chauffage / de la clim corrélé par votre téléphone Android ou iOS qui capte votre réseau wifi personnel. [3]
Et les métadonnées les plus courantes sont les dates et heures de vos discussions avec telle ou telle personne pour en déduire la relation que vous pourriez avoir, et si cette conversation n’est pas chiffrée de bout en bout (c’est rarement le cas) il suffit d’y intercepter quelques mots pour savoir de quoi vous parliez.
Qu’est-ce que “protéger sa vie privée” ?
C’est limiter les données que vous rendez publiques et faire respecter les cercles que vous avez défini.
C’était quelque chose qui demandait un peu d’attention il y a quelques années, aujourd’hui c’est devenu une lutte de tous les jours.
De nombreuses étapes sont accessibles cependant:
- Migrer vos données vers des services d’hébergement non commerciaux (mais pas forcément gratuits). [4]
- Désactiver certaines fonctions de vos smartphones et n’en activer d’autres qu’au besoin et non en permanence.
- Ne plus utiliser les services gratuits en ligne de ces sociétés (depuis les cartes géographiques aux services de visioconférence).
- Lire et poser des questions aux personnes qui sont déjà sensibilisées et vous faire votre propre avis.
Demandez des avis à ceux dont c’est le métier et la passion, dont je fais partie, par exemple par Mastodon (voir le lien dans le menu de navigation).
La vôtre et celle des autres
Lorsque vous enregistrez ou synchronisez vos photos du smartphone sur votre compte Google ou Apple il n’y a pas que vous qui êtes pisté(e), les personnes présentes sur la photo également vos proches, vos amis.
Lorsque vous enregistrez votre carnet de contacts sur votre compte Apple iCloud les coordonnées de toutes ces personnes sont maintenant connues par cette société alors que les personnes concernées n’ont pas donné leur accord.. C’est donc bien un changement de toutes les pratiques de tout le monde qu’il faut effectuer.
Partager la photo ou vidéo du petit nouveau né de la famille sur Facebook est pareil, cet enfant n’a pas donné son accord, n’est même pas en âge de comprendre ce qu’est le consentement que déjà sa vie, son corps (parfois nu) est exposé sur Internet au vu de, dans le meilleur des cas, tout un tas de relations que vous avez.
Pour un peu que la vidéo ou photo soit amusante elle va circuler, sortir de votre cercle restreint du départ et vous en perdrez le contrôle totalement. Pire, c’est cet enfant, cette future personne qui a déjà perdu un peu de sa vie privée..
Les robots (logiciels) de Google, Facebook, Apple et consort scrutent en permanence tout le contenu que vous publiez afin de le classer et d’y ajouter des métadonnées pour leurs clients. Leurs clients étant des sociétés publicitaires ou des sociétés commerciales qui veulent savoir s’ils vont vous envoyer la dernière publicité ou promotion avec le maximum de chance que vous achetiez..
Pour continuer cet exemple, la photo de cet enfant en bas âge vous classera dans les clients susceptibles d’acheter des couches, des peluches etc. Plus grand, des jouets, des livres scolaires…
Les robots sont aussi là pour que ces grosses sociétés se protègent du contenu illégal, pour ne pas risquer de procès pour avoir permis la diffusion d’un contenu répréhensible. Les lois américaines et depuis quelques temps même françaises mettant autant de responsabilité sur l’hébergeur des contenus que sur l’auteur.
La photo, le médecin, la police, le compte fermé
Un exemple assez choquant [5] est l’histoire d’un père aux État Unis ayant craint pour la santé de son enfant: il a transmis à son médecin la photo du sexe de son enfant pour montrer le symptôme. Puis il a oublié cette photo une fois l’enfant soigné.
La photo ayant été synchronisée sur le cloud de Google, elle a été passée en revue par les robots qui ont détecté un enfant nu. Pour se protéger et éventuellement protéger les enfants la société Google a complètement clos le compte du père et transmis l’information à la police.
Cette dernière a fait une enquête (ce qui ne doit pas être simple ni agréable pour le père d’être accusé de pédophilie) et a conclu qu’il n’y avait pas de risque pour l’enfant. Tant mieux ? Oui, mais Google n’a pas rétabli le compte et ne laisse aucun moyen de médiation malgré l’information qu’il n’y avait rien de grave.
Que cela veut-il dire ? Qu’il ne faut pas garder la photo sur son téléphone ? Non Elle peut être synchronisée dans la minute avec les débits des réseaux actuels. Elle peut aussi être reçue par le médecin sur un compte Google, donc le résultat serait le même.
Qu’il ne faut pas prendre ce genre de photo ? Oui et non, il est pratique de pouvoir être rassuré voire d’obtenir un diagnostique rapide.. En revanche, éviter pour le père et pour le médecin d’utiliser les services gratuits ou payants de ces sociétés oui ! De chiffrer toutes les données personnelles, surtout de santé .. De quitter ces services pseudo-gratuits et faire moins confiance parce qu’il s’agit de technologie qu’on ne maîtrise pas.
Il faut se renseigner, demander une formation pour comprendre les bases si besoin, comprendre comment ça fonctionne à votre niveau d’intérêt technique et demander plus d’informations à celles et ceux qui savent lorsque cela est nécessaire.
Cet article est déjà très long, je vais l’arrêter là. Les solutions concrètes à tout cela arrivent dans le dernier article de la série pour éviter de tout éparpiller.
J’ajouterai des liens dans les deux sens afin de retrouver plus facilement les informations. Comme toujours, si vous souhaitez retrouver des articles qui m’ont incité à écrire ceci, vous pouvez vous rendre ici: tag Vie privée
Merci d’avoir lu jusqu’ici :)
| [1] | C’est une expression vraiment réçente parce que si vous la décorrelez des réseaux sociaux sur Internet cela devient carrément inquiétant :D |
| [2] | Remise en cause du droit à l’avortement de la consitution, attaque du Capitole pour remettre la présidence à un ancien président sans élections, .. |
| [3] | Oui Apple le fait aussi malgré leur argument de protection de la vie privée, ils récupèrent ces informations et les vendent également: https://links.epyisageek.net/?searchterm=&searchtags=ViePrivee+Apple |
| [4] | J’aborderai dans le dernier article les solutions d’hébergement alternatives, dont les C.H.A.T.O.N.S |